La clinique Odissey, spécialisée dans la procréation médicalement assistée à Douala

La clinique Odissey, spécialisée dans la procréation médicalement assistée à Douala

Douala est la capitale africaine de la procréation médicalement assistée. Pionnière dans ce domaine, le docteur Ernestine Gwét-Bell nous a ouvert les portes de sa clinique. Invitation au bonheur.

Il fait très sombre dans la salle d’opération. Cinq personnes s’affairent autour de la patiente: le docteur Ernestine Gwét-Bell, un anesthésiste et trois assistantes. Blouse verte, coiffe, masque, surchaussures… Ambiance stérile et calme. On entend juste régulièrement le bip du cœur de Pauline-Emmannuelle, preuve que tout semble bien se dérouler. Le but de cette intervention: prélever des ovocytes qui serviront ensuite à réaliser une fécondation in vitro (FIV). À l’écran de l’échographe, le docteur Gwét-Bell traque les taches noires. Elle pensait en trouver six. Ce ne sera finalement que quatre. Dès que la sonde vaginale lui en indique une, elle s’arme de la seringue aspirante. Le prélèvement effectué est tout de suite réceptionné par le laboratoire situé juste derrière le mur.

Étape suivante, dans le laboratoire justement. Le matin même, Pierre-Alexis, le mari de Pauline, est venu à la clinique pour un prélèvement de spermatozoïdes. Là, Nicole Akoung, biologiste et phar­macienne de formation, s’occupe de les traiter, de les trier, pour ne garder que les meilleurs. ceux qui auront plus de chances de féconder les ovocytes. Elle retire les cellules mortes, lave le sperme, le passe dans une centrifugeuse et repère ainsi les plus mobiles, les plus virulents des spermatozoïdes. Avant de mettre tout le monde en contact dans l’étuve, une machine qui a les mêmes propriétés que le ventre de la femme, explique-t-elle, une température de 37° et 5% de dioxyde de carbone : les conditions idéales pour que l’embryon se développe.» Il ne reste plus qu’à attendre 24 heures. Et à espérer que la fécondation ait lieu. Qu’elle donne un embryon. Et que cet embryon, une fois placé dans l’utérus de la patiente, ne se décroche pas.

« Peur d’avoir un enfant bizarre »

procreation-medicalement-assistee-pma-douala-cameroun-mamy-muna-2Dans sa chambre, Pauline se réveille doucement. C’est son premier essai de fécondation in vitro. Pierre et elle sont mariés depuis quatre ans et depuis tentent, en vain, d’avoir un enfant. Très vite, ils ont fait procéder à des analyses et ont décou­vert qu’elle avait des problèmes de trompes. L’une bouchée, l’autre per­méable. Pierre n’aurait pas de réels pro­blèmes. Peut-être des spermatozoïdes un peu faibles, mais rien de grave. Pauline a donc commencé par prendre des médicaments, et suivi des traitements hormonaux. Mais toujours pas d’enfant. La famille commençait à poser des ques­tions. La pression. Le stress de devoir vivre leurs rapports tel jour à telle heure ! Le blocage.

La jeune femme avait bien entendu parler de la fécondation in vitro à la télé­vision. Mais elle avait des réticences. « Peur d’avoir un enfant bizarre, raconte­ t-elle, et puis au réveillon de l’an dernier, j’ai rencontré une amie qui a aujourd’hui un fils de 2 ans. C’est un très beau garçon! Cette amie m’a pris par la main et m’a dit que ça la fatiguait de me voir comme ça. C’est là qu’elle m’a révélé qu’elle avait eu recours à la procréation médicalement assistée. Je me suis donc décidée ».

30% de couples stériles

Au centre médical Odyssée, la clinique du docteur Gwét-Bell, la journée conti­nue. Cette fois, elle est en salle d’accouchement pour une insémination artifi­cielle. Techniquement, elle injecte les spermatozoïdes d’Étienne dans le fond de la cavité utérine de Catherine. Après trois ans de mariage, le couple ne par­vient toujours pas à obtenir une grossesse naturelle. Après examen, il s’avère que le de sperme d’Étienne avait des problèmes. «Mais personne ne le sait, avoue la jeune femme, en  Afrique, on parle difficilement de ces choses-là. Notre couple est jeune et l’on me conseillerait d’y renoncer. Nous, on se contente de dire qu’on attend de faire réellement l’acte de mariage pour penser aux enfants. Pour l’instant, nous ne sommes mariés que sous le régime coutumier.»

Comme Pauline et Pierre, comme Catherine et Étienne, 30 % des couples en Afrique souffrent aujourd’hui de stérilité. Comme partout dans le monde, d’ailleurs. Mais en Afrique, le problème est plus dramatique, du fait de l’importance de la maternité et de la filiation. « Une femme sans enfant ne joue pas son rôle de femme,déplore le docteur Gwét-Bell, or, dans la moitié des cas, cette infertilité n’est pas fatale. Beaucoup de causes sont évitables. » Dans 40% des situations, il s’agit en effet soit de trompes bouchées ou perméables – séquelles d’infections sexuellement transmissibles ou d’avortements clandestins – soit d’une mau­vaise qualité du sperme. Or dans ces deux cas, on obtient des résultats réellement satisfaisants aujourd’hui grâce à la procréation médicalement assistée : la fécondation in vitro ou l’insémination.

Au milieu des années 90, un petit groupe d’amis médecins de Douala, gynécologues et biologistes, ont donc décidé de se mobiliser pour apporter une solution à leurs patients.  Ernestine Gwét-Bell, Berthe Bollo, Guy Sandjon, Monique Onomo, Nicole Akoung et Christian Pany sont tous retournés à leurs études en Europe, aux États-Unis, au Canada.

« Ça ne faisait pas partie de notre programme scolaire, explique Ernestine Gwét-Bell, et puis, c’est quelque chose de délicat. Nous travaillons sur des cellules humaines qui vont ensuite devenir des personnes… Il ne faut pas faire n’importe quoi !. »

300 bébés éprouvettes depuis 1998

Quelques formations plus tard, ils sont revenus avec Guy Cassuto, un biologiste français, pour lancer les premières FIV. En avril 1998, Thommy, le premier bébé éprouvette d’Afrique subsaharienne (hors Afrique du Sud) voyait le jour au Centre des techniques de pointe en gynécologie obstétrique. Depuis, ces médecins ont mis au monde 300 enfants de cette manière-là. Des bébés camerounais, mais pas seulement. Les couples viennent de toute l’Afrique centrale pour l’insémination à Douala, Cameroun. D’Europe même ! « En France par exemple, la réglementation est assez rigoureuse, rapporte le docteur Gwét-Bell, seulement cinq FIV, avoir moins de 40 ans, être marié. Ça pousse certaines femmes à venir ici : la technique devançant toujours la réglementation, pour  l’instant, ce n’est pas encore trop rigide. »

Mais la situation devrait changer et un comité d’éthique se mettre en place pour éviter les dérives, lorsque le nombre de centres se multipliera, ainsi que celui des demandes. Et nul ne doute qu’il augmentera rapidement. « Si le Cameroun met enfin en place le système de sécurité sociale dont il parle depuis des années, nuance Ernestine Gwét-Bell, car le traitement coûte entre 850 000 et 1,5 million de francs CFA. Cela reste donc l’obstacle principal, même si des tontines se mettent en place pour soutenir financièrement ces couples. »

Seul obstacle car, du côté des mentalités, les choses semblent évoluer assez vite. Ainsi, si Pauline avoue n’avoir pour l’instant mis que sa mère et une tante dans la confidence, elle promet qu’elle le dira ensuite à tout le monde  …..

mais seulement si elle tombe enceinte !

 300 bébés éprouvettes depuis 1998

Quelques formations plus tard, ils sont revenus avec Guy Cassuto, un biologiste français, pour lancer les premières FIV. En avril 1998, Thommy, le premier bébé éprouvette d’Afrique subsaharienne (hors Afrique du Sud) voyait le jour au Centre des techniques de pointe en gynécologie obstétrique. Depuis, ces médecins ont mis au monde 300 enfants de cette manière-là. Des bébés camerounais, mais pas seulement. Les couples viennent de toute l’Afrique centrale pour l’insémination à Douala, Cameroun. D’Europe même ! « En France par exemple, la réglementation est assez rigoureuse, rapporte le docteur Gwét-Bell, seulement cinq FIV, avoir moins de 40 ans, être marié. Ça pousse certaines femmes à venir ici : la technique devançant toujours la réglementation, pour  l’instant, ce n’est pas encore trop rigide. »

Mais la situation devrait changer et un comité d’éthique se mettre en place pour éviter les dérives, lorsque le nombre de centres se multipliera, ainsi que celui des demandes. Et nul ne doute qu’il augmentera rapidement. « Si le Cameroun met enfin en place le système de sécurité sociale dont il parle depuis des années, nuance Ernestine Gwét-Bell, car le traitement coûte entre 850 000 et 1,5 million de francs CFA. Cela reste donc l’obstacle principal, même si des tontines se mettent en place pour soutenir financièrement ces couples. »

Seul obstacle car, du côté des mentalités, les choses semblent évoluer assez vite. Ainsi, si Pauline avoue n’avoir pour l’instant mis que sa mère et une tante dans la confidence, elle promet qu’elle le dira ensuite à tout le monde  …..

mais seulement si elle tombe enceinte !

www.cliniqueodyssee.com

Article paru en 2004 dans le Continental

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