Violée par un oncle, un prêtre, un professeur et un cinéaste, cette jeune camerounaise lance un émouvant cri du cœur

Violée par un oncle, un prêtre, un professeur et un cinéaste, cette jeune camerounaise lance un émouvant cri du cœur

Les Mamys, il est de ces histoires qui donnent à s’interroger sur la nature même du genre humain, sa propension à la cruauté envers son prochain et en même temps, sur son incroyable faculté d’empathie. C’est une histoire comme celle-là, révoltante, outrageuse et à la fois émouvante qui va vous être comptée sous le prisme du témoignage d’une jeune camerounaise en détresse. Victime de viol à de multiples reprises, elle a poussé un cri du cœur sur les réseaux sociaux, un appel à l’aide auquel nous n’avons pu rester insensibles. À toi qui liras ses mots, nous en espérons tout autant…

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Elle s’appelle Sonia Fokam, les Mamy Muna. Camerounaise résidant à Yaoundé, elle a livré sur le réseau social Twitter le 23 mai dernier, le récit de son cauchemar. Un témoignage glaçant, poignant et perturbant dont les scènes racontées nous renvoient parfois aux origines les plus sombres de l’humanité. Voici son histoire.

Tout a commencé en en août 2011, période de grandes vacances. Admise en classe de 3e, Sonia, âgée alors de 13 ans, va voir sa vie basculer. Elle raconte :

« Le lundi 1er, je devais me rendre à Douala pour une manifestation familiale (un baptême) qui devait avoir lieu le dimanche 7 août. Les vacances d’avant (2010) j’avais passé un mois à Douala et nous étions chez un oncle vraiment très chaleureux (mon bourreau). Il était à l’écoute des enfants. Le genre d’oncle qu’à priori, tout le monde voulait avoir… ».

Pour le baptême pourtant, Sonia ne va pas résider chez cet oncle-là. Elle ira chez un autre. Trois jours avant l’événement, elle croisera son futur bourreau qui dès lors, lui fera remarquer comme bien elle avait « bien grandi ». Les intentions de ça les Mamys ! Si seulement Sonia avait pu imaginer ce qui se cachait derrière…

Dimanche 7 août, jour de baptême et après les festivités que l’on imagine s’être tenues en lieu saint, tout le monde se retrouve à sa maison de résidence. Seulement voilà, là-bas, elle connaîtra une dispute avec l’une de ses cousines qui la fera fondre en larmes.

« Mon oncle (le vicelard) gentil, me propose devant tout le monde de monter dans la voiture, qu’on aille et que je change d’air, raconte Sonia. Nous arrivons chez lui au rond-point Maetur (quartier de Douala). Il me dit ‘Prends ma bible et mes téléphones tu viens déposer dans ma chambre’. Et donc quand j’arrive, il me dit qu’il a très mal au dos et veut un massage. J’y vais sans arrière-pensée. Puis il me retourne brusquement et me renverse sur le lit ».

La suite fait froid dans le dos les Mamys…

Son oncle lui demande si elle est vierge. Et Sonia de répondre par l’affirmative toute effrayée. « Je vais vérifier », lui annonce alors son bourreau, la faisant aussitôt fondre en larmes de peur et d’impuissance. Malgré le refus de sa nièce, l’oncle va la souiller, la pénétrant de ses doigts puis de son pénis.

« Je le regardais, il prenait du plaisir, explique Sonia. Je ne réalisais pas. Mes larmes étaient chaudes. Ensuite, c’étaient menaces sur menaces : Si j’en parle, il va me tuer. Il n’y a rien de mal à ça. J’étais une belle femme et il m’aimait. C’est pour notre bien. On va s’aimer mais notre amour restera secret ».

Après son forfait, l’oncle perfide raccompagnera sa victime sur le lieu de la fête. Sonia confie avoir été terrorisée, n’avoir parlé à personne et d’être retournée plus tard à Yaoundé.

Malgré « les saignements d’eau et de sang » qu’elle subit, Sonia ne trouve pas le courage de parler à son père, médecin soit dit en passant, ou à sa mère. Son attitude change du tout au tout, traumatisée par le heurt qu’elle a subi :

« Je n’étudie plus, j’enchaîne les 8 de moyenne. Je me mets à la cigarette (jusqu’à aujourd’hui)… Mes parents disent que c’est la puberté. Je suis privée de tout. Ma mère m’a bastonnée à cause de mon bulletin ».

Deux semaines plus tard, Sonia réussit finalement à se confier à quelqu’un, sa sœur. Sa famille entière finira par apprendre le viol qu’elle a subi en décembre de la même année. La nouvelle, comme elle dit, fait l’effet d’une « bombe ». Cependant…

« Les clans sont créés, ma mère est sous pression et désiste la plainte qu’elle a [pourtant] portée. Je suis bouleversée lorsque ma famille arrive à croire que je raconte des histoires. C’est moi la menteuse. PLUS PERSONNE ne me croit. Je commence à coucher à droite à gauche parce que je me sens très sale… Je n’étais vouée qu’à ça ».

Pauvre Sonia. Et dire que son calvaire ne faisait que commencer…

Un an plus tard, en octobre 2012, Sonia avait 14 ans et était en classe de 2nde. Elle raconte le récit du second moment qui a marqué sa vie à l’encre indélébile :

« Lors d’une semaine d’évangélisation au collège que je fréquentais, un jeune prêtre en devenir à cette époque nous encadrait. Il venait d’une autre congrégation. Il s’appelait Ezéchiel. J’avais besoin de parler et il suivait ses cours à l’école Catholique de NKolbisson pas loin de chez moi. Donc j’y vais un samedi après les compos, histoire de lui raconter ce que je vis. À mon arrivée, on a parlé mais il m’a copieusement violée et m’a même donnée le nom de la pilule à acheter. C’est comme ça que je découvre le Norlevo (pilule contraceptive) ».

Traumatisée une fois encore, Sonia ne trouve pas le courage de se confier à sa famille. La première fois, cela avait mal tourné et elle craint que l’histoire ne se répète. La jeune fille va se tourner vers un prêtre de son école :

« Ezéquiel (son violeur) est contacté. Il nie les faits et dit que c’est moi qui l’allumait au contraire. On me demande à l’école de ne plus en parler ».

Hallucinant !

Suite à cela, Sonia fera 4 tentatives de suicide et enchaînera les rencontres d’un soir. Elle confie d’ailleurs ne pas savoir par quel miracle elle n’a pas attrapé de maladies sexuellement transmissibles.

Elle poursuit son histoire : « J’enchaîne les pilules et médicaments en tout genre. On me diagnostique à l’hôpital des kystes dans les ovaires. Je commence un traitement qui est difficile à tenir parce que entre-temps, mon père est à la retraite, c’est compliqué. Mais je vis avec ».

Le calvaire de Sonia ne s’arrêta pas pour autant, au plus grand de ses malheurs…

En classe de 1ère, durant l’année 2013/2014, Sonia sera violée par son professeur de maths. Se trouvant face à la menace d’un renvoi pour une affaire de mœurs, son enseignant profita de sa faiblesse pour l’alcooliser, puis la violer :

«… Il me propose donc de m’accompagner me reposer et, étant saoule, il me ramène dans une maison et me viole. Le matin je retrouve des préservatifs par terre ». 

Parce qu’elle a découché sans explication, son père interdira à Sonia de remettre les pieds chez lui. Elle ira vivre chez sa grand-mère résidant dans le quartier d’Etoug Ebe, qui n’aura elle-même pas manqué de l’insulter en la voyant. Sa mère aussi. La jeune fille composa son probatoire dans cette nouvelle demeure et ne rentra chez ses parents qu’après l’obtention de son examen. Elle passa ensuite son année de terminale sans se faire violer… courte année de répit malheureusement :

« Je passais mes journées à l’aumônerie ou à la louange. Je n’étais pas très brillante et j’avais perdu le goût de tout », raconte-t-elle. Elle entra ensuite à l’Esstic (Ecole supérieure des sciences et des techniques de l’information et de la communication).

« J’avais eu le concours. C’était la plus belle chose de ma vie quand on sait comment les concours sont parrainés. J’étais sur la liste d’attente et j’ai finalement été admise. Je commence à être passionnée par le cinéma et j’écris à un cinéaste camerounais. Il me dit de passer à son bureau. On parle et puis il me dit comment je suis belle. Son deuxième film à succès est en train de sortir. Au moment de rentrer chez moi, il me plaque au mur et m’embrasse pendant que je me débats. Il tire le col de mon corsage vers le bas et prend mon téton dans sa bouche. Je crie, il prend peur et je m’enfuis ».

On en reste sans voix !

Cette année-là, Sonia commence des séances de psychothérapie qu’elle peut à peine se payer. Les années suivantes, elle décide d’aller de l’avant. Elle tomba même amoureuse mais subira une déception qui la plongera « dans la morosité absolue ». À court de moyens, elle voit la formation qu’elle suit à l’Esstic s’inscrire en pointillés. Rentré du Maroc, son frère – qui la détestait –, lui fait subir mille tortures en la battant au point qu’elle décide de fuir la maison familiale. Elle finira par y retourner après un conseil de famille, fera même sa soutenance, mais en février de cette année-là, elle fait un « Burn out et une discussion explose avec [son] père ».

Elle se retrouve une énième fois à la rue.

« Je suis hors de la maison. Je trouve un petit boulot de commercial en février et un bon samaritain m’aide à payer mes premiers mois de loyer dans le studio que je loue actuellement. Il me donne de quoi vivre, 300 000 Francs CFA, que je prête à un ami qui doit démarrer son business d’agence de communication. Il était censé me les remettre en mars. Entre-temps, mes kystes ne me laissent pas tranquille. C’est la misère. Il faut suivre le traitement, je n’ai pas d’argent. Mon ami n’ami n’a pas encore mes 300 000 Francs CFA. J’emprunte ailleurs en disant remettre en avril, puis le 25 mai. Je risque une citation directe ».

Elle poursuit : « Le médecin m’explique qu’une ablation des ovaires est envisageable si le traitement actuel ne fonctionne pas. Ma mère passe me voir, elle est présente. Elle m’aide comme elle peut. J’appartiens aujourd’hui à une association qui lutte contre les abus sexuels. Je vie ma vie, avec tout ce que cela comporte comme peine. Je suis debout parce que j’ai des amis en or qui sont là, et je suis sûre que l’histoire de ma vie sera plus joyeuse ».

Les Mamys, Sonia réfléchit aujourd’hui à comment réunir le Gouvernement camerounais autour d’une table, avec des victimes, afin que les mesures adéquates soient prises. Elle écrit un livre qui s’intitulera « Exutoire », une autobiographie romancée qui, comme elle l’explique si bien, « présentera les méandres d’une enfance étouffée ».

Alors ne restez pas insensible face à son témoignage. Retrouvez Sonia sur son compte Twitter ou sur son compte Facebook, et apportez-lui le soutien, quelle qu’en soit forme, mais dont elle a assurément besoin.

Du courage petite soeur ! Tu n’es pas seule…

C.B.

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